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Il n’est pas trop tard, mais il est temps de doper le sport à l’école

Il ne s’agit évidemment pas d’introduire l’EPO comme adjuvant obligatoire du cursus scolaire, mais de rendre au sport à l’école la place qui lui revient dans l’éducation des enfants, des adolescents et des jeunes étudiants.

On en parle beaucoup, mais on l’oublie trop souvent : le sport pratiqué correctement est l’un des meilleurs vecteurs de formation et d’intégration sociale.

Les tristes images de la dernière coupe du monde de football, les récents scandales de dopage en Belgique et ailleurs doivent nous inciter à réagir et à mieux encadrer notre jeunesse pour une prise de conscience éthique et responsable de la pratique sportive.

Il ne faut ni banaliser ni ridiculiser Zidane pour son coup de boule, pas plus que les phases d’anti-jeu permanentes, ou la peur de perdre, sans parler des enjeux financiers démesurés. On n’est plus très loin des Jeux du Colisée à Rome. Des distractions pour calmer le peuple - mais aujourd’hui à des prix et pour des salaires astronomiques.

De plus, c’est un pays tout entier qui soutient avant tout le sport professionnel, celui qui dispose de la manne financière pour être médiatisé. Les droits TV ont enflé les spots publicitaires générés par ces spectateurs acharnés que nous sommes des Champions League, Jeux olympiques et autres Tour de France. Nous sommes tous devenus les complices des bailleurs de fonds publicitaires, la masse des sportifs assis dépassant de loin celle des sportifs debout.

Par ailleurs, beaucoup d’institutions publiques investissent encore l’argent des contribuables dans la construction ou l’entretien coûteux de stades avant tout dédiés au sport professionnel On nous rétorquera que ces clubs entretiennent de « coûteuses » écoles de jeunes.

Mais combien seront-ils ces jeunes « prometteurs » (belges ?), une fois jeunes adultes, à jouer en équipe première, plus de deux ans en Belgique ?

La Ville de Bruxelles soutient le Mémorial Van Damme, qui fait défiler chaque année 150 à 200 athlètes - dont cinq Belges, au maximum, dans les meilleures années. La Golden League est ainsi devenue le meilleur produit de découverte de coureurs africains, éthiopiens ou kenyans pour la plupart, et rapidement oubliés.

Aux Etats-Unis, sport amateur et sport professionnel sont compartimentés et règlementés, aidés par le formidable levier du système éducatif américain, que ce soit dans les « high schools » ou les établissements de type universitaire.

Chez nous, les soutiens financiers au sport à l’école sont dérisoires surtout en Communauté française - et ce n’est pas nouveau.
Le ministre des Sports actuel, Claude Eerdekens, jongle souvent avec de très petits moyens pour le sport en général, bien qu’il ait pu récemment conclure un accord avec l’Union (nationale !) belge de football pour l’accompagnement de la formation de jeunes footballeurs. Un petit miracle !

Attention, il n’est pas question de supprimer ou de dévaloriser le sport professionnel, mais de mieux le présenter à notre jeunesse, par le biais d’une éducation saine, responsable et sportive.

Il faut réveiller les consciences, il n’est pas trop tard, mais il est temps. Revaloriser auprès des jeunes l’image de l’effort sportif pur, gratuit et du dépassement physique de soi. Un peu à l’image de cette Angleterre du XIXème siècle, époque des découvertes industrielles et des sports alors pratiqués par une élite. Une utopie vraiment ?

De quoi notre pays et les autres pays européens ont-ils le plus besoin ? D’une jeunesse de mieux en mieux formée et en bonne santé physique et psychique : « la tète et les jambes » !

Le décret de Bologne a révolutionné le système éducatif européen en y intégrant un esprit permanent de compétition pour les universités et hautes écoles. Pourquoi ne pas créer au niveau sportif européen un esprit similaire de compétition ? Cela pourrait se faire par le biais d’une compétition annuelle entre établissements secondaires et universitaires à l’échelon européen, qui se déroulerait sur toute une année, pour des sports à des rythmes et régions à définir, et serait subsidiée du moins au départ par l’Union européenne.

Des études régulières comparent déjà annuellement le niveau scolaire de tous les étudiants européens. Ces confrontations sportives inter pays et inter régions pourraient donc mieux comparer sportivement les uns avec les autres et en particulier avec ces nouveaux membres « ex-pays de l’Est » qui bien que souffrant de moyens budgétaires fortement réduits, disposent encore aujourd’hui de valeurs sportives bien ancrées dans leur système éducatif. La vision d’un véritable championnat européen des écoles secondaires et des universités devrait attirer les médias et donc à terme l’intérêt de tous. Les sports à choisir pourraient être multiples et les règles appliquées plus strictes, notamment en matière de fair-play. Par exemple : carte rouge pour un tirage de maillot au foot ; et tout dopage exclu, évidemment. Les contrevenants seraient exclus de toute sélection.

Véhiculer au travers de notre jeunesse une autre image du sport que celle, prédominante, du sport professionnel, ne serait-ce pas une élévation, les jeunes rencontrant des étudiants sportifs d’autres pays qui comme eux combinent étude et pratique sportive intense ? Bien entendu, certaines compétitions existent déjà pour la jeunesse, mais trop souvent ponctuelles et réservées à des élites (souvent très jeunes et même trop jeunes !) qui ont largement perdu le fil conducteur des études. Pas le temps disponible ? Il faut 1 à 3 heures maximum en avion de ville à ville en Europe. Avec le développement du TGV, cela devrait aller en s’améliorant. On pourrait facilement y consacrer quelques week-ends, quelques jours des vacances scolaires, quelques jours d’avance sur la rentrée. Ceci revaloriserait aussi, et de manière profonde dans le secondaire, le rôle trop souvent négligé du professeur de gym qui deviendrait un véritable manager et professeur de sport.

Plutôt que de sortir chaque année plusieurs études coûteuses montrant l’obésité grandissante de notre jeunesse, défendons un projet fédérateur et européen qui met l’Europe en devenir sportif.

Jacques Vanhee,

Ex-président de la Ligue royale belge d’athlétisme, vice-président du Panathlon Wallonie-Bruxelles, ancien athlète international.

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